Oyez oyez gentes internautes en goguette !!! Prenez le temps de vous arrêter et de prêter une oreille compatissante à l’incroyable et tragique épopée musicale de Gwenhael Navarro, alias Koudlam. L’esprit vraisemblablement torturé, ce mercenaire sonore intergalactique est, depuis son émergence sur la scène Techno Rave hexagonale, en croisade perpétuelle tant contre l’ethnocentrisme et la facilité musicale que contre l’establishment du showbiz ou l’appauvrissement culturel. Mais ce Don Quichotte du XXème siècle a troqué sa fidèle jument contre une Carte Miles Platinium de l’Alliance Skyteam. Il ère ainsi de manière plus ou moins aléatoire dans l’espace monde entre la Bolivie, le Mexique, Paris ou l’Afrique de l’Ouest à la recherche de dahus sonores susceptibles de nourrir son étrange électro New Wave mondialisée.
Ce boulimique de nouveautés brasse fiévreusement et inlassablement une sorte de Gloubi Boulga monstrueux composé de tous les styles musicaux, cultures, esthétiques, philosophies, paysages ou sensations que son frénétique encéphale aura pu ingurgiter lors de ses pérégrinations aux quatre coins de la galaxie. Et Winnie The Pooh ne nous contredira pas, plus les fleurs butinées sont foisonnantes et diversifiées, plus la saveur du miel en est magnifiée. La preuve en grande pompe avec quelques extraits du protéiforme chef d’œuvre Goodbye, album démiurge et pervers qui saborde avec délice une musique céleste sur le point de tutoyer les anges…
Bien loin le temps où les Beatles défrayaient la chronique avec leur révolutionnaire Sergent Peppers et où leurs concurrents outre-Atlantique répliquaient en grande pompe avec la déferlante d’un Smile dévastateur. Sans parler du menaçant The Wall de Pink Floyd qui, tout d’un coup s’est hissé, sans crier gare, au titre de mythe dans le panthéon musical… Cela faisait ainsi des lustres que l’on était persuadé que le Concept Album n’était plus qu’une astuce marketing obsolète, recyclée en tête de gondole du rayon discount d’un hyper pour chef de produit de majors en manque d’inspiration.
Mais voilà ce trublion de Koudlam qui nous prend tous à contrepied avec la sortie en 2009 de l’entêtant Goodbye qui compose une fresque sonore, grandiose et austère, unique, entre tonalités New Wave et format résolument électro. Il tutoie le sacré avec des pistes comme Brother ou Flying Dolphins dans lesquelles s’installe progressivement cette indicible sensation mêlée d’euphorie et d’oppression que l’on peut par exemple ressentir en pénétrant dans la nef d’une cathédrale gothique. Parfois entraînantes (See you all, over the black hills with crazy horse) souvent dénudées et glaciales (Middle, Love Song), toujours menaçantes et déconcertantes, les douze pistes du disque s’articulent à la manière d’un étrange conte baroque New Age sans queue ni tête. Pas facile au début de se repérer dans ce fatras de sons, de mélodies, de rythmes qui tutoient aussi bien la fureur froide à fleur de peau de Joy Division, que la musique savante et expérimentale d’un John Cage.
Pauvre pêcheur, après avoir supporté les ricanements de satyres de l’intro tu peux enfin pénétrer dans ce monde parallèle aussi enchanteur que diabolique. Flying over the black hills with crazy horse et son inlassable thème développé à la flûte de pan puis au synthé en est un exemple parfait. Si les sonorités reposantes et dépaysantes sont dignes de figurer en bonne place dans la dernière compil Relaxation de Nature & Découverte. il reste toujours une tension dans la mélodie et sa répétition qui finit par exploser lorsque la partie chantée devient implorante à la fin du morceau. Tonight est aussi un modèle du genre. Le morceau démarre, sautillant et enjoué, avant de basculer brutalement avec un hululement strident glaçant. Le chef d’orchestre machiavélique Koudlam, expert en retournements de situation les plus rocambolesques, clôt alors le morceau en grande pompe dans une ambiance symphonique incongrue que l’on retrouve notamment sur See You All ou à la fin de Flying over the black hills with crazy horse.
See You All, parlons-en justement! C’est LE tube entêtant du disque. Valse New Wave qui, si elle avait vu jour quelques décennies auparavant, aurait tout aussi bien fait l’affaire dans la célèbre scène spatiale de Kubrick que Le Beau Danube Bleu de Strauss. D’autant plus que l’étrange scène de guerilla urbaine du clip pourrait être mise en parallèle avec la séquence de l’affrontement entre les deux tribus australopithèques du film de Stanley. Porté par un beat 80’s à la Kraftwerk, le timbre grave qui n’a rien a envier à Ian Curtis se balade de manière indolente dans une ambiance molletonnée et sirupeuse. Rêve de Télétubbies ou overdose médicamenteuse ? Rien n’est vraiment tranché dans ce chef d’œuvre d’ambiguïté.
A ce stade on ne pensait plus pouvoir être étonné … Mais comment résister à la déferlante qui s’abat ensuite avec le riff dévastateur de Love Song ? Crescendo de plus en plus furieux de basse et de saturation, ce tsunami engloutirait n’importe quel tympan à peu près en état de marche relié à tout semblant de système nerveux. Aucun espoir de s’en tirer indemne !
Malgré le dérisoire sursaut que constitue la fulgurance techno de Middle, les déchirants Goodbye et Wave of mutilation qui suivent, implacables, semblent clairement professer la funeste destinée de tout un chacun. Il ne te reste aucun espoir pauvre mortel ; au départ néant tu redeviendras bien vite poussière, et ce n’est surtout pas un pauvre disque d’électro qui changera l’ordre des choses. En digne héritier des Vanités picturales de la Renaissance qui rappelaient aux puissants leur immuable condition de mortels, Goodbye explore ainsi la funeste destinée de la condition humaine. L’extrême onction de Hole achève enfin le Harakiri nihiliste de l’album.
Un petit tour, et puis s’en va...
Un petit tour, et puis s’en va...
Goodbye c'etait il y a 3 ans. 2009 parait loin, depuis Alcoholic Hymn, plus pop, moins sombre, moins radical, plus décevant.
RépondreSupprimerDepuis, on attendant.
A noter le meilleur de Koudlam avec "Live at Teotihuacan"
Tout à fait d'accord. Ecoutez "Eagles of Africa"
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